Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ? Ou s’agit-il plutôt de mauvaises nouvelles ?

Actuellement, il y a peu d’informations à rapporter sur la région des Kivus en République démocratique du Congo : les négociations récentes à Doha n’ont abouti qu’à ce qu’elles ont pu produire, c’est-à-dire une conclusion plutôt creuse, sur laquelle chacun des protagonistes pouvait tirer ses propres enseignements, sans que les véritables enjeux cruciaux aient été abordés. En principe, les discussions devraient reprendre à partir du 8 août, lorsque les négociations seront relancées à Doha. Autour du 16 août, tous les détails devraient être discutés, afin que Donald Trump puisse, d’ici la fin du mois, présenter un accord de paix définitif entre le Rwanda et la RDC. Sur le papier, cela paraît très prometteur, mais beaucoup se demandent si cela sera réellement réalisable dans la pratique. D’autres craignent qu’un accord, même conclu, reste extrêmement fragile.
Personne ne souhaite donner davantage d’explications sur ce qui est en train de se passer. Pour Kinshasa, il est désormais clair que la M23 devra quitter la zone qu’elle a libérée et que l’autorité de l’État central devra être rétablie. La M23 affirme que cela n’a pas encore été discuté, mais pour la majorité de ses membres, il est inconcevable qu’ils cèdent leur position aux anciens dirigeants locaux. Cependant, d’autres accords ont été signés à Doha : Kinshasa s’engage à libérer 700 prisonniers politiques avant la reprise de la seconde ronde de négociations, prévue la semaine prochaine, et un cessez-le-feu aurait été convenu pour arrêter les hostilités. Mais ces engagements ne sont que partiellement respectés.

Prisoniers
Par ailleurs, la mobilisation militaire autour d’Uvira se poursuit, des deux côtés du front. La FDLR mène également une nouvelle opération pour déstabiliser les plaines autour de Rutshuru, sous la direction de leur commandant à Kinshasa. On ne parle plus du tout de la neutralisation de la FDLR, alors que, selon les accords antérieurs, cette étape aurait déjà dû être entamée la semaine dernière. Il y a quelques jours, la M23 a annoncé qu’elle enverrait un représentant à Doha si les 700 prisonniers ne sont pas libérés à Kinshasa, mais un haut responsable de l’organisation nous a confié en coulisses que cette menace n’était qu’un moyen de maintenir la pression. Tout cela reste donc très flou, et le peu d’informations que l’on obtient tant à Kinshasa qu’à Goma ou à Kigali ne fait qu’accroître la sensation que les négociations de paix sont au point mort, servant surtout à faire briller l’image d’un président à la Nero en Washington. Ce dernier a pu aujourd’hui se pavaner avec un prétendu accord de paix entre la Thaïlande et le Cambodge, en se targuant d’être un véritable apôtre de la paix.

« J’ai aussi beaucoup de mal pour l’instant à établir des contacts réguliers et de les faire parler à Kinshasa et à Goma, » confie un collègue observateur. « Je pense qu’à Kinshasa, ils commencent à se réaliser que ce projet pourrait aussi leur porter préjudice : les Américains s’intéressent avant tout aux minerais, et s’ils peuvent mettre la main dessus en poursuivant le dialogue avec le Rwanda ou la nouvelle direction à Goma, Tshisekedi aura du mal. Le président congolais est, tant par ses alliés que par ses adversaires, perçu comme un partenaire très incertain et incapable. À Kigali, ils observent la scène en silence, pendant que la M23 domine le terrain. J’avais aussi envie d’écrire quelque chose à ce sujet, mais je préfère attendre d’avoir plus d’informations avant de le faire. »
ADF-Nalu
« Les dernières jours, l’actualité en RDC a surtout été marquée par les actions terroristes de l’ADF-Nalu, entre Bunia et Beni, » ajoute un autre observateur. « Ils ont tué plus de 40 civils innocents dans cette zone. Le fait que l’on cache l’information sur les négociations entre la M23 et le pouvoir à Kinshasa n’est pas bon signe. Cela montre aussi qu’ils ne savent probablement pas trop quoi en faire, et selon ce qu’on me dit, ils y attachent peu de crédibilité. Tant Kinshasa que Goma ont une très mauvaise réputation dans la presse internationale quant à la fiabilité des informations qu’ils diffusent, et vérifier ces données sur le terrain est à la fois difficile et coûteux. Ces deux capitales sont généralement considérées par la majorité des journalistes comme peu amies des médias. Non, je ne vois pas comment tout cela pourrait bien se terminer. »
J’ai écrit cet article pour répondre principalement aux nombreux appels de nos lecteurs qui nous demandent ce qui se passe réellement et pourquoi il y a soudainement si peu d’informations. Moi-même, je ne peux pas donner de réponse satisfaisante, car, pour des raisons logistiques et surtout parce qu’aucune des parties impliquées n’est disposée à s’entretenir longuement en coulisses, je ne sais pas comment cette histoire va finir. Mais, pour être honnête, je ne vois pas cela évoluer de bon augure. Nous reprendrons cette analyse dès que le brouillard se lèvera.
Marc Hoogsteyns
Kivu Press Agency